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  • : Au collège
  • : Je suis professeur d'histoire-géographie au collège Félix-Djerzinski de Staincy-en-France. Ce métier me rend malade et il fait ma fierté. Avant d'en changer, je dépose ici un modeste témoignage.
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3 août 2008 7 03 /08 /août /2008 00:26

A la fin du manuel Ozouf - Leterrier (lire les épisodes précédents), on trouve une "liste de questions posées aux candidats aux récents examens du certificat d'études primaires". Ce sont, en quelque sorte, des micro-annales. En voici la première page.
(Cliquez sur l'image pour agrandir. Pour des raisons que j'ignore, Over-blog me laisse le choix entre deux formats : l'un, immense, ne rentre pas, l'autre, trop petit, est peu lisible).


A titre de comparaison, voici le sujet d'histoire du brevet de cette année.
(Tu cliques idem).


(Oui, la carte originale est presque aussi moche que celle-ci.)

On voit la différence des deux évaluations. Il y a quarante ans, on requérait des élèves des connaissances abondantes, assez précises et immédiatement mobilisables (et je rappelle qu'il s'agissait d'élèves moyens et faibles, les meilleurs étant depuis belle lurette dispensés de passer le certif'). Le candidat pouvait être interrogé sur n'importe quelle période de l'histoire, de l'Egypte antique à 1945. On ne demandait en revanche à cette génération aucune autre compétence que de la mémoire et de la clarté dans la restitution des acquis. L'école se bornait à fournir repères et contenus -le risque étant évidemment que ces derniers ne fassent l'objet que d'une mémorisation imbécile.
Aujourd'hui, les jeunes gens de quinze ans qui passent le brevet ne sont tenus de posséder aucun savoir particulier. Les réponses aux questions qu'on leur pose se trouvent dans les documents de l'énoncé. La consigne du paragraphe argumenté invite bien les élèves à utiliser leurs "connaissances personnelles", mais celles-ci, d'après les instructions qui nous ont été données, ne comptent que pour deux points maximum. Un texte recyclant les informations laborieusement arrachées aux documents peut très bien atteindre un score de 8/10 : il suffit que son auteur évite la paraphrase totale et fasse preuve d'un minimum d'ordre dans l'exposé. Autorisés à se présenter à l'examen en ignorant tout du programme (qui part de 1914, et non plus de - 3000 comme naguère), nos collégiens doivent par contre montrer à leurs correcteurs qu'ils ont des compétences : dans un texte, un tableau, une image, ils savent sélectionner l'information utile, celle qui répond à la demande de l'examinateur. Puis ils doivent être capables de rassembler ces bribes dans une synthèse lisible. C'est un peu mécanique. Nous travaillons, en fait, à formater des logiciels de gestion des données ; des logiciels plutôt bas de gamme, dirais-je.

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commentaires

R
"Le rôle des corporations a-t-il été bienfaisant" ?Cette question me paraît particulièrement intéressante. Elle montre qu'il existe une potentialité de réflexion. Bien sûr, je me doute qu'il s'agissait en grande partie de répéter une démonstration sur la place des corporations dans la société médiévale, mais malgré tout, dans le cadre d'un examen oral, les qualités de réflexions pouvaient apparaître.Ceci étant, le terme de "bienfaisant" est particulièrement touchant (d'aucuns diraient anti-scientifique au possible, mais c'est un autre problème). Et à la réflexion, je m'aperçois que j'aurais bien du mal à répondre à cette question !
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D
<br /> Pour information, voici le passage que le manuel consacre aux corporations (dans le chapitre "Les villes au Moyen Âge") :<br /> <br /> "L'industrie s'exerçait dans les bourgs et devint de plus en plus active. On comptait à Paris, au temps de Saint Louis, une centaine de métiers : boulanger, boucher, drapier, bonnetier, orfèvre,<br /> cordonnier, forgeron, etc. Le travail se faisait à la main, dans de petits ateliers familiaux, comprenant au plus cinq ou six ouvriers. L'atelier servait de boutique et le patron vendait lui-même<br /> sa marchandise aux passants dans la rue. Dans la plupart des villes, les artisans du même métier habitaient la même rue : rue des Tisserands, de la Tannerie, des Orfèvres, de la Ferronnerie, etc...<br /> Ils étaient réunis obligatoirement en corporations.<br /> La corporation comprenait trois catégories : les apprentis, de dix à dix-huit ans environ, logés et nourris chez le patron ; les compagnons, embauchés chaque année<br /> pour un salaire déterminé ; les patrons ou maîtres. Au Moyen Âge, on pouvait accéder assez facilement à la maîtrise, à condition d'être bon ouvrier, d'avoir les moyens de<br /> s'établir et de présenter un chef-d'oeuvre. Le chef-d'oeuvre consistait par exemple pour les boulangers en un très beau pain, pour les armuriers en une bonne épée. Quelques siècles plus<br /> tard, il sera très difficile au contraire de devenir patron.<br /> Des règlements établis par des maîtres jurés formant la jurande, déterminaient très minutieusement les conditions du travail, dont personne ne devait s'écarter. A la longue, ces<br /> règles entravèrent le progrès. Mais elles eurent au début l'avantage de contraindre les ouvriers à ne fournir que du travail bien fait. Chacun d'ailleurs avait le goût de son métier et se faisait<br /> honneur d'appartenir à sa corporation.<br /> Auprès de chaque corporation, il existait une confrérie, à caractère religieux. Elle avait son saint patron : saint Crépin pour les cordonniers, saint Eloi pour les<br /> orfèvres, saint Fiacre pour les jardiniers, etc... ; sa chapelle à l'église, sa bannière, ses armoiries. Les jours de fête étaient très nombreux et on se réunissait en de joyeux banquets. Mais la<br /> confrérie, à l'aide de cotisations, venait aussi en aide à ses membres dans le malheur, aux veuves et aux orphelins.<br /> Cette organisation familiale du travail convenait bien à la petite industrie du Moyen Âge." <br /> <br /> Dans le résumé, ces lignes se ramassaient de la façon suivante :<br /> "L'industrie, très active, était organisée en corporations, comprenant des apprentis, des compagnons et des maîtres."<br /> <br /> Seul le résumé devait être appris par coeur ; quant au reste, l'élève devait le comprendre et le retenir en substance. Si la réponse à la question que vous avez choisie est très<br /> nettement suggérée par le texte de la leçon, on voit que le candidat au certif' disposait d'un panel d'arguments pour étayer et nuancer son propos. <br /> <br /> <br />
L
J'ai apprécié ce post, devine, notamment vos propos plutôt nuancés.J'ajouterai ceci - citer l'épreuve du certif ne prouve pas que tous les élèves d'alors savaient la réaliser (je n'ai aps en tête le % de réussite au certif)- il est inexact d'affirmer qu'il n'y a aucune connaissance exigée aujourd'hui sur l'ensemble des périodes historiques ; vous oubliez l'exercice de repérage.- d'autre part, sur le paragraphe qui est aujourd'hui demandé, un élève ne peut correctement utiliser les informations données par les documents s'il ne sait pas les relier à la période et aux faits historiques auxquels elles renvoient. En cela je trouve que l'exercice d'aujourd'hui et plus exigeant et plus intelligent que ce qui était demandé naguère. (On peut par conter débattre de la manière dont on y prépare les élèves)- la différence entre les deux examens montre surtout l'adaptation de ceux ci au temps. Aujourd'hui, l'information est partout ; l'essentiel est sans doute d'apprendre aux élèves à savoir les analyser, les comparer, les hiérarchiser, à faire preuve d'esprit critique plutôt qu'à les gaver de conaissances qui - comme vous l'écrivez très justement -  risquent d'être oubliées sitôt l'examen passé.Il me semble qu'on n'est pas loin d'être d'accord.
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J
C'est dommage n'est-ce pas ? "Les temps ont changé" si j'ose dire.Mais vaut-il mieux savoir restranscrire du "par coeur" (qui est devenu la bête noire de l'éducation nationale depuis de longues années) ou réaliser une synthèse d'un document ?Le problème avec les méthodes que l'on cherche à imposer aux professeurs aujourd'hui, et avec les examens auxquels nous avons droit, c'est que nous, collégiens ou lycéens, sommes (j'ai l'impression, de mon humble avis...) pris pour des imbéciles. M'enfin...
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D
<br /> Dommage ? C'est difficile à dire. Les sujets de type "Certif" avaient leur mérite : impossibilité de décrocher le diplome sans travail personnel ; nécessité, non seulement de mémoriser un<br /> ensemble de connaissances, mais de savoir les mobiliser à la demande d'un tiers ; aptitude à dire ce que l'on sait et, le cas échéant, à expliquer (le certif étant un examen oral, l'examinateur<br /> avait le droit de demander des précisions au candidat imprécis ou récitant comme un perroquet). Cet ensemble de compétences scolaires n'avait rien de méprisable ! Mais il est évident qu'un examen<br /> de type certif' n'est plus possible, d'une part parce qu'il demande un énorme investissement de la part des élèves et qu'on peut supposer qu'à peine 10 % des candidats le décrocheraient dans<br /> certains établissements, d'autre part parce qu'il ne fait pas assez de place aux qualités "intellectuelles" de l'élève, telles que la faculté d'analyse, l'expression écrite, l'esprit critique, etc,<br /> tout ce que la pédagogie moderne prétend inculquer aux élèves et leur demande en retour au moment des évaluations. Va, donc, pour une alternative. Le problème est que le brevet est une bien triste<br /> alternative, où les compétences évaluées sont très, très, très basiques, où le niveau de connaissances requises est proche du plancher (pour ne pas dire du troisième sous-sol), et dont le niveau<br /> d'exigence est fixé assez bas pour qu'une proportion prédéterminée de candidats décroche la timbale.<br /> Franchement, je ne vois absolument plus à quoi ça sert -alors que le certif', lui avait au moins une vraie signification scolaire et nationale... <br /> <br /> La grande difficulté est que le DNB est un examen national unique, ce que n'était pas le certificat de fin d'études primaires -les élèves qui fréquentaient le lycée et ses petites<br /> classes, les riches en fait, en étaient dispensés. Le certif' marquait sauf exception la fin des études de ceux qui le passaient, des élèves d'origine modeste ; il attestait que son titulaire<br /> possédait certains acquis scolaires (parmi lesquelles des connaissances historiques) et permettait à terme l'accès à certaines fonctions intermédiaires sur le marché du travail. Aujourd'hui en<br /> revanche, on passe le même examen en fin de troisième à Henri IV et à Félix-Djerzinski, cet examen ne marque la fin de rien du tout puisque les élèves doivent encore tirer un voire<br /> deux ans avant d'atteindre la fin de leur scolarité obligatoire, il n'est la porte d'accès de rien du tout parce qu'il n'est pas qualifiant et que l'orientation des élèves est décidée bien avant<br /> que les résultats soient connus, enfin il n'atteste d'aucune connaissance particulière et de "compétences" sommaires et d'un intérêt bien douteux...<br /> <br /> On nous prend pour des imbéciles, dis-tu ? Sans doute, mais en même temps c'est fait avec la meilleure volonté du monde. C'est à mon sens la chose la plus consternante.<br /> <br /> <br />
Y
Mes lycéens seraient incapables de répondre aux questions du certificat d'étude. J'enseigne les lettres et quand il s'agit de situer un texte dans son contexte historique c'est une véritable catastrophe, même pour les meilleurs. Ils mélangent tout, n'ont aucune notion de chronologieIl y a deux ans, à l'oral du bac un élève de 1ère Es avait été incapable de me dire ce qu'il s'était passé en 1789... (un exemple parmi beaucoup d'autres...)
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D
<br /> "Ils mélangent tout, n'ont aucune notion de chronologie", écrivez-vous ; ce n'est pas très grave aux yeux des instances académiques et ministérielles, du moment qu'ils savent lire un texte et en<br /> tirer les deux ou trois grandes idées, aller chercher une statistique dans un tableau, ou repérer dans la légende d'une carte l'information importante qui va leur permettre, comme dans un jeu<br /> vidéo, de décrocher le super-bonus qui leur permettra de passer au niveau suivant. 1789 on s'en fout, c'est vieux, il est trop tôt pour préparer le tricentenaire et ceux qui veulent savoir<br /> n'ont qu'à aller sur Wikipedia. <br /> <br /> <br />
M
Mieux vaut une tête bien faite qu'une tête bien pleine. Les recommandations de M Montaigne ont donc été suivies.
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D
<br /> Oui, mais il vaut mieux une tête bien pleine qu'une tête vide. Montaigne, je pense, le postulait de façon tacite.<br /> <br /> <br />